Comptes rendus
de
de
parus dans la presse française & en ligne
Le
Matricule des Anges,
n°162, avril 2015, rubrique « Repères », p.7.
Patrícia Galvão (1910-1962) n’était pas une Brésilienne de
tout repos : féministe scandaleuse et militante communiste trop ingérable
pour un parti communiste dépassé, elle mena de petits métiers en activités
suspectes une existence vouée à l’agit-prop
sous les pseudonymes de combat de Pagu ou de Mara Lobo. Au point de devenir la
première prisonnière politique du Brésil et d’écoper de plus de cinq ans de
prison durant la décennie 1930. Et dès 1932, outre un journal satirique, elle
rédigea un roman, Parc industriel,
qui s’avère être le premier roman prolétarien publié au Brésil. D’inspiration
aussi féministe que marxiste, on y suit le parcours de femmes de São Paulo sur
un mode vif et imagé par des dialogues que la traduction d’Antoine Chareyre
sert très bien.
Enfants mal nourris, grèves, maris au chômage, drapeaux
rouges, ateliers textile, c’est la vie du lumpenprolétariat du quartier du Brás
qui se déploie sous sa plume à un rythme trépidant, saynète après saynète.
« Elle n’a plus jamais travaillé.
Quand elle a faim elle écarte les jambes devant les hommes. Elle était sortie
de prison. Avait voulu mener une vie nouvelle. Sollicité un emploi de domestique
au Diário Popular. Elle est prête à
rendre n’importe quel service à n’importe quel prix. » Pagu, c’est
Zola revu par Fénéon, Frapié sous cocaïne — pas le temps de se lancer dans des
descriptions —, une rage de témoigner de la réalité ouvrière comme les
journalistes tiennent la chronique des grands boulevards : à la
six-quatre-deux. Sans recherche esthétique, et même avec brutalité. On en sort
sonné, mais ébahi par le talent de cette jeune journaliste en herbe, sorte de
Roberto Arlt énervé qui porte le couteau entre les dents pendant qu’elle écrit.
Bref, une découverte particulièrement frappante.
[Article repris, dans une version revue et augmentée, sous le titre « Patricia Galvão » dans : É. Dussert, Cachées par la forêt (138 femmes de lettres oubliées), préf. de Cécile Guilbert, La Table Ronde, 2018, p. 419-421.]
[Article repris, dans une version revue et augmentée, sous le titre « Patricia Galvão » dans : É. Dussert, Cachées par la forêt (138 femmes de lettres oubliées), préf. de Cécile Guilbert, La Table Ronde, 2018, p. 419-421.]
« Lusophonies » par Corinna Gepner
Site de l’ATLF, billet du 29 avril 2015.
De la Brésilienne Patrícia Galvão, dite Pagu, les éditions Le
Temps des Cerises et le traducteur Antoine Chareyre nous font découvrir Parc industriel, roman prolétaire, une
œuvre de 1933.
L’œuvre est surprenante, crue, abrupte, un de ces textes qui
n’a cure de plaire ni d’être aimable, tout entier qu’il est à sa vocation dénonciatrice :
montrer la misère de la classe prolétaire brésilienne en cette difficile
période de l’entre-deux-guerres. Au travers de quelques personnages, ouvrières,
prostituées, bourgeoises d’adoption, leaders ouvriers, on plonge dans l’univers
des exploités, du dénuement, des rêves déçus et des lendemains qui ne chantent
guère. Une force habite ce roman et le fait échapper à ce que son propos
pourrait avoir de trop démonstratif. Il pulse de vie et d’énergie, présente
avec la densité du raccourci tous les rêves, toutes les batailles, les
désillusions et les renaissances qui président au combat social et permettent à
l’esprit de la révolte de se perpétuer envers et contre tout.
L’ouvrage a été édité avec un grand soin, reprenant certaines
des caractéristiques typographiques de l’édition originale, ce qui en fait un
bel objet livre. La traduction a très bien su faire passer la singularité de
cette voix littéraire, sans chercher à esquiver les rugosités, sans non plus
les souligner. Un abondant appareil de notes et une copieuse postface
témoignent en outre de l’engagement du traducteur dans cette entreprise
éditoriale.
La
Nouvelle Quinzaine littéraire, n°1135, 16-30 sept. 2015,
rubrique « Histoire
littéraire », p.22.
Encadré — et avec quel panache — par un prologue en coup de gong de
Liliane Giraudon et la longue postface du traducteur, Antoine Chareyre, Parc industriel est un court roman, paru fin 1932 au Brésil sous le pseudonyme de Mara
Lobo. Mara Lobo est Pagu. Pagu est Patrícia Galvão.
Le livre réserve quatre
chocs successifs. Le premier, la couverture constructiviste, à l’allure de
« fenêtre Rosta », inspirée de celle, agressive, magnifique, de l’édition
de 1932 : de grands à-plat noirs qui découpent à angles aigus ce qui
semble être des toits d’usine surmontés d’une cheminée plantée de travers comme
une croix sur un crâne (la couverture originale, où le nom de l’auteure et le
titre en portugais font partie intégrante de la composition dessinée par Galvão
elle-même, figure en page 12). Le deuxième choc, c’est le prologue de Liliane
Giraudon, splendide profération biographique à la mise en pages provocante. Le
troisième choc, deux épigraphes, violemment contrastées, dont voici la
seconde : « La statistique et l’histoire de la couche humaine qui
soutient le Parc Industriel de São Paulo, et qui parle la langue de ce livre, se
trouvent, sous le régime capitaliste, dans les prisons et les baraquements
ouvriers, dans les hôpitaux et dans les morgues ».
Tout est déjà dit, mais
le quatrième choc, non le moindre, c’est l’écriture, vive comme un match de
ping-pong, qui cisèle, par petits chapitres aux titres en coups de fouet,
eux-mêmes faits de très courts paragraphes sans fioritures, les espoirs et les
déboires d’une demi-douzaine d’ouvrières du textile. Une écriture syncopée,
elliptique, très brillante, et ponctuée par endroits de slogans, de propagande
frontalement marxiste : une langue qu’on ne parle plus, ici d’une
fraîcheur étonnante — une langue de bois, mais de bois gravé, qui joue son
rôle, y compris esthétiquement, dans le roman. Cassant l’esthétique par le
politique et inversement. Car là est le secret de fabrication, le moteur de la
création. En 1931, Patrícia Galvão, jeune femme de vingt-deux ans issue de la moyenne
bourgeoisie, poète, écrivain, dessinatrice, journaliste sous le nom de Pagu, ardemment
engagée, incontrôlable, vite lancée (elle secoue depuis trois ans déjà le
microcosme littéraire avant-gardiste de São Paulo) adhère au parti communiste
brésilien avec son mari, le poète moderniste Oswald de Andrade. Par ses
témérités et ses provocations, elle s’attire la méfiance du Parti, qui la met à
l’écart l’année suivante. Elle part à Rio et réagit alors en rédigeant, « en
toute hâte », écrit-elle, ce Parc industriel avec son
sous-titre, « roman prolétaire », comme un gage de la droiture de son
militantisme. Voulu comme une offrande et un acte de propagande.
Galvão joue de tous les
effets d’une dynamique qui oscille entre subtilité et caricature, ces deux contraires
bien émulsionnés, comme dans le cinéma muet. Elle nous balade à toute allure d’un
« secteur de la lutte des classes » à l’autre : rues,
ateliers, baraquements ouvriers, hôtel chic, bordel, hôpital, carnaval, réunion
syndicale, prison, meeting, cinéma, etc., en une suite de petits tableaux vifs
comme le mercure, sans commentaires, d’autant plus signifiants. Ce n’est pas
sans rappeler Berlin Alexanderplatz (publié en 1929) — non que je veuille écraser Galvão sous l’ampleur
biblique de Döblin. La fermeté de la traduction, directe et transparente aux
non-dits, n’est pas étrangère au charme de la lecture. L’action est située à São
Paulo, centrée dans le quartier ouvrier du Brás, autour de l’année 1931, et met aux prises avec des
intellectuels ou des grands bourgeois un quintette d’ouvrières, Matilde, Eleonora,
Otávia, Rosinha, Corina, chacune avec ses raisons, son destin. Avec ou sans
prise de conscience. Cernées à grands traits, comme dans la peinture
expressionniste ou la gravure sur bois, elles n’en vivent pas moins d’une vie réaliste
et subtile à la fois.
Parc industriel étonna,
fut très bien reçu, puis vivement pris à parti, la personne haute en couleur de
Pagu y étant pour quelque chose. Le sous-titre a beaucoup fait réagir, et dans tous
les camps. Quelques mois après la sortie du livre, un critique écrivait :
« Il semble que pour l’auteur l’objectif de la révolution soit de
résoudre la question sexuelle ».
Mais que montre Galvão ? Elle souligne de grands traits noirs
les structures économiques du Brésil au début des années trente et, plus
finement, montre les relations humaines telles que les pervertit socialement,
intellectuellement, moralement, le capitalisme, c’est-à-dire très exactement la
dégradation que les rapports de classe provoquent dans les rapports humains. Le
corps des femmes est comme partout le point nodal où se révèlent, en se
confrontant à leurs contradictions, les structures politiques et économiques.
Dans le roman, classes et individus se croisent — chacun ses projets, ses projections
—, se mêlent le temps d’un carnaval ou de rapports amoureux, mais, comme l’eau et
l’huile, restent impossibles à fusionner. Très précisément daté dans le Brésil
qui vient de connaître le coup d’État de Vargas (jamais nommé), le livre laisse
la même impression d’actualité que, dans une tout autre esthétique et une force
autre, l’essai de Sigfried Kracauer Les Employés, publié en 1930 à
Berlin, et qui brûla dans les autodafés de 1933.
Dans les notes et la
postface, minutieusement, passionnément, Antoine Chareyre donne le contexte
historique, le mouvement des avant-gardes de l’époque, la fortune critique du livre,
et replace celui-ci dans le parcours biographique de Galvão. Si impliquée qu’elle
soit dans son roman — qui plus est un premier roman —, tout ce qui témoigne d’un
chemin biographique n’est pas seulement délité par les huit décennies écoulées,
mais absorbé et résorbé comme les cotylédons et les feuilles primaires dans la
croissance du haricot. Galvão balaie les scories de l’ego : la tension de
sa réflexion, sa température, parviennent à dépasser le narcissisme d’une très
jeune femme surdouée, belle, arrogante, fascinante. Reste une pensée et un art,
c’est-à-dire une œuvre.
Patrícia Galvão demeure
presque inaperçue en France jusque dans les années quatre-vingt. Quelques
poèmes sont traduits dans la revue Banana Split en 1985. Un poème
traduit par Maryvonne Lapouge-Pettorelli est publié par La Quinzaine
littéraire (1), Chareyre le note avec quelque fierté (la fierté est
partagée). Il adresse habilement ce roman d’une « vaincue de l’histoire », englouti par la défaite des
idées qui l’ont suscité, à ceux « qui ne regimbe[nt] pas à fréquenter
[...] les genres mineurs ou la littérature de genre ». Mais en laissant l’avenir ouvert, car Pagu est devenue une
légende.
1. QL n°484, 16 avril 1987.
Compte rendu par Frédérique
Guétat-Liviani
Sitaudis.fr, 20 avril 2015, rubrique « Les parutions »
Parc industriel est un livre étrange.
Celle qui l’a écrit aussi.
Parc industriel paraît à São Paulo en
1933.
Signé Mara Lobo. C’était
un des nombreux pseudonymes de Patrícia Galvão.
Mais c’est sous le nom de
Pagu qu’elle se fera connaître.
Dans cette édition
française, en prologue, un poème de Liliane Giraudon.
Bien que ce poème
n’apparaisse pas dans Les
Pénétrables, Pagu est une Bien-Aimé(e) de Liliane
Giraudon.
C’est d’ailleurs dans la
revue Banana Split en
1985, que paraissent, pour la première fois traduits en français (par Inès
Oseki-Dépré), des textes de Pagu.
Le livre se referme sur
une postface scrupuleusement documentée du traducteur Antoine Chareyre.
Elle est toute jeune Pagu,
lorsqu’elle écrit ce livre. 22 ans seulement.
Avant, elle a déjà fait
pas mal de choses comme : fréquenter l’Avant-garde artistique, rejoindre
le groupe Anthropophage, écrire des poèmes, participer à des concours de
beauté, épouser Oswald de Andrade…
En 1931, elle adhère au
Parti Communiste Brésilien. Son désir de Révolution ne peut se satisfaire de la
fréquentation des salons bourgeois. La même année, elle est interpellée dans un
meeting de soutien à Sacco et Vanzetti.
Emprisonnée, le Parti lui
fait signer un document dans lequel elle le dédouane de ses agissements.
Et c’est pour regagner la
confiance de ce Parti-là qu’elle décide d’écrire Parc industriel.
Elle veut écrire un texte
de propagande pour prouver son engagement.
Mais là, elle se trompe
terriblement !
Le Parti n’est pas dupe.
Il trouve dans son livre le souci de la forme et de l’invention.
Dans son roman prolétaire, elle insère
des slogans mais ces fragments de propagande qui apparaissent en titre de
chapitres ou sous forme de poèmes-conversations, ont plus à voir avec les
collages de Schwitters qu’avec des pratiques d’agit-prop.
Elle enchâsse dans son
roman divers éléments empruntés au langage de la rue, de la presse, des
meetings. Toutes sortes de langages non-littéraires, collectifs, anonymes,
traités sans distinction.
Pagu ne méprise pas ses
lecteurs, elle ne cherche pas à abêtir les masses, elle ne désire pas le
pouvoir.
Alors c’est plus fort
qu’elle, quand elle croit écrire un livre de propagande, elle écrit un roman
dont la forme tout à fait neuve ne s’attache à aucun modèle préexistant.
Dès la première page, un
document chiffré : c’est la statistique industrielle de São Paulo en 1930.
Plus bas en quelques mots, Pagu fait valser la statistique.
Du début à la fin, on voit
s’étirer la longue file des
enfants naturels de la société.
Pagu tente de les nommer,
avant que toute trace d’eux ne soit effacée.
Corina fait partie de cette
longue file. Enceinte, elle perd son emploi. Le corps déformé par la grossesse,
elle travaille au bordel et enrichit
peu à peu son vocabulaire érotique.
Pagu parle des corps qui se sexualisent, des langues malicieuses, des seins délibérés.
La sexualité doit aussi
être le lieu de la révolution et le corps des femmes cesser d’être un objet
exploitable.
Est-ce que Marie-Madeleine
a connu la faim quand elle était pute ?
Les phrases sont courtes,
des éclairs sur la page, puis du blanc, de la grande lumière sur le corps des
prolétaires.
Au lieu de longues
descriptions, des listes.
Une table, une vieille
nappe. Une cruche, des verres. Une cloche défectueuse. La direction.
Le texte est lacéré. Les
phrases, le récit, entaillés. Comme les vies prédécoupées des êtres qui
s’égarent dans le Parc industriel.
La seule chose qui intéresse
Pagu c’est la matière absolument brute de la vie.
En cela elle ouvre la voie
du roman prolétaire ou
roman social brésilien.
Dont on attribuera la
paternité à Jorge Amado.
Ainsi le nom de l’étrange
Pagu restera longtemps effacé.
Clara Magazine, avril-mai 2015.
La vie et la lutte des
ouvrières du textile à São Paulo, leur oppression par le capitalisme et le
patriarcat, leurs résistances et leurs compromissions avec la bourgeoisie,
autant de sujets qu’aborde ce roman réaliste. Le propos est clairement social
et politique, marxiste et féministe.
L’auteur, Patrícia Galvão
(1910-1962), était une femme engagée. Elle participa à la gauche radicale et
culturelle brésilienne, puis à l’action des partis communistes du Brésil et de
France. Elle fut la première femme emprisonnée pour des raisons politiques au
Brésil. Impliquée dans les manifestations du Front Populaire, elle fut aussi
emprisonnée en France.
Parc industriel, considéré comme le premier roman prolétaire
brésilien, a été publié en 1933. Une traduction française vient de paraître aux
éditions Le Temps des Cerises. Une postface du traducteur, Antoine Chareyre,
fournit de précieuses informations sur le contexte historiques ainsi que sur la
vie et les engagements de Patrícia Galvão.
Compte rendu par Charybde 2
Charybde 27 : le blog, billet du 15 juin 2017.
La misère ouvrière et la
lutte sociale dans les années 1930 à São Paulo. Saisissant.
« Dans le grand pénitencier
social, les métiers à tisser se dressent et avancent en hurlant.
Bruna a sommeil. Elle est restée tard à un bal. Elle s’arrête et
frotte avec colère ses yeux brûlants. Ouvre sa bouche cariée, baille. Ses
cheveux frustes sont couverts de soie.
– Zut ! Comme ce dimanche est passé vite… Les riches peuvent
dormir autant qu’ils veulent.
– Bruna ! Tu vas te faire mal. Regarde tes tresses !
C’est son compagnon à côté.
Le Chef de l’Atelier s’approche, lentement, mauvais.
– J’ai déjà dit que je ne veux pas de bavardage ici !
– Elle aurait pu se faire mal…
– Vauriens ! C’est pour ça que le travail ne rapporte pas !
Petite misérable !
Bruna se réveille. Le garçon baisse sa tête révoltée. Il faut la
fermer !
Ainsi, dans tous les secteurs prolétaires, tous les jours, toutes
les semaines, tous les ans ! »
C’est en 1933 que, trente-cinq ans avant le
célèbre L’établi de Robert
Linhart, et sous le pseudonyme vite transparent alors de Mara Lobo, que Patrícia Galvão, dite Pagu, figure-clé du mouvement
littéraire et intellectuel moderniste au
Brésil, publie ce compte-rendu romancé, à la fois réaliste et enflammé, de son
implantation en tant qu’ouvrière textile à São Paulo. Mêlant description des
réalités économiques et sociales les plus sordides aux éléments d’éducation
politique populaire, annotations très précises, glissées dans les
conversations, sur les événements de l’époque comme sur les caractéristiques de
cette société brésilienne dont la bourgeoisie a été la dernière du continent à
abolir l’esclavage, en 1888 — et dont le cynisme emblématique faisait déjà la
joie sombre de la lectrice ou du lecteur des Mémoires posthumes de
Brás Cubas (1881) de Joaquim
Maria Machado de Assis —, Parc industriel se
revendique en sous-titre comme « roman
prolétaire », et l’affirme avec une véhémence candide qui pourrait
presque faire sourire aujourd’hui, si l’exploitation sans vergogne décrite et
documentée ici n’était pas hélas une constante historique inexorable, sous ses
formes diversement mutantes au fil des années.
« – On a pas le temps de
connaître nos enfants !
Séance d’un syndicat régional. Des femmes, des hommes, des
ouvriers de tous les âges. De toutes les couleurs. De toutes les mentalités.
Conscients. Inconscients. Vendus.
Ceux qui recherchent dans l’union le seul moyen de satisfaire
leurs revendications immédiates. Ceux qu’attire la bureaucratie syndicale. Les
futurs hommes de la révolution. Révoltés. Anarchistes. Policiers.
Une table, une vieille nappe. Une cruche, des verres. Une cloche
défectueuse. La direction.
Les policiers commencent le sabotage en interrompant les orateurs. »
Avec une verve cruelle qui se soucie peu d’effets
spéciaux, sur un terrain humain dense et foisonnant dans sa quête de vie plutôt
que de survie (que l’on pourra utilement comparer à la reconstitution effectuée
à Rio de Janeiro par le Paulo Lins de
Depuis que la samba est
samba), Patrícia Galvão dresse
un tableau impitoyable et bizarrement goûteux d’une trépidation sociale
fondamentale, ne cachant ni heurs ni malheurs, ni les trahisons et les
palinodies des unes ou des autres, ni les occasions manquées et les luttes
continuées. Montrant aussi la permanence des procès en pureté ouvrière et la
méfiance toujours prête à jaillir vis-à-vis d’intellectuels et de bourgeois
épousant « la cause du peuple », elle nous offre un regard historique
et humain d’une acuité souvent effarante.
L’édition proposée par le Temps des Cerises en 2015 propose de surcroît
un excellent prologue de Liliane Giraudon,
et une postface extrêmement documentée d’Antoine
Chareyre, à qui l’on doit également cette traduction haute en couleur et
en justesse.
« En ville, les théâtres sont
pleins. Les palais dépensent en tables copieuses. Les ouvrières travaillent
cinq ans pour gagner ce que coûte une robe bourgeoise. Elles doivent travailler
toute leur vie pour acheter un berceau.
– Ils tirent tout ça de nous autres. Notre sueur est transformée tous les jours en champagne qu’ils jettent par les fenêtres ! »
– Ils tirent tout ça de nous autres. Notre sueur est transformée tous les jours en champagne qu’ils jettent par les fenêtres ! »
*
Sur la nouvelle édition
brésilienne
« Ouça : é o
apito da fábrica que hoje soa forte »
par Walnice Nogueira Galvão
Pernambuco (Suplemento Cultural do Diário Oficial do Estado) (Recife),
n°151, sept. 2018, rubrique
« Resenhas », p.28.
Há 85 anos Pagu lançava Parque industrial, « romance proletário » agora reeditado
O livro Parque industrial, de Pagu,
clássico do « romance proletário » assinado pelo pseudônimo Mara
Lobo, acaba de receber reedição impecável, que honra a autora e a obra. Abre-o,
noblesse oblige, um
prefácio de Augusto de Campos, que redescobriu Pagu nos anos 1980. Até então,
tinha-se vaga noção de uma Pagu associada tanto aos fastos modernistas quanto à
saga da esquerda.
A edição reproduz a capa original, só
mudando a cor. O leitor recebe o impacto de uma composição de estética
modernista a mais não poder, com manchas assimétricas e agenciamento dos
dizeres em tipos diferentes. Linhas oblíquas esboçam arestas que se
interseccionam, recortes deixam entrever a silhueta do gueto concentracionário da
fábrica. E se a capa original se valia do preto e branco, agora a cor vermelha
com sua semântica predomina. Assina-a o renomado artista plástico Lívio Abramo,
um dos grandes da gravura.
O leitor ganha dois alentados estudos
pinçados nas traduções para o francês e para o inglês, escritos por
especialistas no modernismo brasileiro : ademais, entusiastas de Pagu, tal
como Augusto de Campos. Antoine Chareyre fornece notas de rodapé esclarecedoras
para estrangeiros e nativos. Kenneth David Jackson, de Yale, há pouco deu por
concluída a compilação de toda a obra jornalística de Pagu, que rendeu quatro
volumes. Faz falta um histórico das edições, e, se Antoine Chareyre o
esclarece, ainda assim conviria uma nota editorial no início.
A diagramação manteve a distribuição
em blocos, acentuando a concepção da narrativa fragmentada, em instantâneos ou
flagrantes que se dispõem por curtos e incisivos capítulos. A prosa, entre
expressionista e cubista, certamente é de vanguarda. Visa à síntese,
apoiando-se sobre elipses e cortes súbitos, acentuando a velocidade do discurso
que não perde tempo em explicações ou transições. Um pouco tendendo ao que
então se chamava « prosa telegráfica ».
A narrativa — que se passa no Brás, à
época reduto operário de imigrantes italianos em São Paulo —, ao encaminhar-se
num crescendo para a eclosão de uma greve, traz uma evidência logo de saída :
trata-se de um romance de mulheres. São moças de vários tipos e instâncias da
vida social, embora unidas pela classe : pertencem todas ao proletariado.
Há poucas exceções, como aquela que subiu na vida casando-se com um homem de
posses ; ou aquela que chegou aos abismos da prostituição mais
desamparada, por ter perdido o emprego e não ter saúde para enfrentar a
extenuante jornada de trabalho. No mais, são operárias mais politizadas ou mais
alienadas, mais decididas a enfrentar as agruras da vida ou mais desesperadas.
O dia a dia das jovens trabalhadoras é mostrado em suas facetas de tarefas,
vida social, amores, militância. A imersão de Pagu em sua própria proletarização
e trabalho na fábrica é húmus para a elaboração ficcional. Seu ativismo é ponto
de partida, e mais anos de cárcere ainda viriam.
Mostra também o assédio que as
operárias sofrem dos rapazes de automóvel, para quem são mercadoria de carne,
aliás descartável. Nem noivas nem prostitutas, não são elegíveis para casamento
nem exigem pagamento — portanto, são altamente convenientes, até por saírem
barato. Nesse mesmo ano de 1933, Noel Rosa compôs o samba Três apitos, em que fala das operárias de fábrica e desse assédio,
só que mediante idealização benigna e sentimental, não predadora, do dono do
automóvel.
Pagu, a de múltiplos talentos, tem
sido progressivamente revelada, à medida que se publicam mais inéditos :
memórias, poemas, contos policiais, desenhos e croquis, charges, tirinhas,
sempre mordazes, até ferozes na demolição da burguesia. No tablóide O homem do povo, hoje em
edição fac-similar, que dirigiu com Oswald de Andrade, manteve uma coluna
chamada A mulher do povo.
Satirizava o contingente frívolo ou ocioso do gênero feminino e desenhava uma
história em quadrinhos cuja protagonista se chamava Kabeluda (um dos atributos
de Pagu).
Mais tarde, jornalista cultural de
excelente nível, forneceria em seus artigos pequenos trechos que ia traduzindo
de autores bem difíceis como Beckett, Ionesco, Artaud.
Permaneceria intransigente até o fim
na defesa das vanguardas e do inconformismo. Sua beleza, seu charme e sua
combatividade seriam cantados em prosa e verso. O reconhecimento, embora
tardio, é crescente : multiplicam-se teses e trabalhos universitários,
reedições, filmes, programas de teatro e TV. Tornou-se nome de escolas, de
centros culturais e de institutos de pesquisa, bem como da revista consagrada a
estudos de gênero Cadernos de
Pagu, da Unicamp. E já ganhou canção e samba-enredo. Ícone do
feminismo, esta transgressora é considerada uma precursora. É de sua autoria
nosso mais importante romance proletário, e a seu lado quase todos os demais
dessa voga — ressalvadas honrosas exceções —, conservadores e ortodoxos, nada
vanguardistas, empalidecem. Seu romance, comunista e feminista ao mesmo tempo,
ergue-se ímpar na literatura brasileira.
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